La promesse n’a pas suffi hier, et la question brûle encore aujourd’hui. L’Ukraine cherche des engagements solides, car une simple signature ne protège pas une frontière. Le précédent l’a montré, et il pèse sur chaque décision actuelle. Les garanties de sécurité figurent au cœur du débat, avec une exigence claire : des mécanismes concrets, mesurables, applicables, et enfin crédibles.
Le précédent de 1994 et les garanties de sécurité promises
En 1994, États-Unis, Royaume-Uni et Russie signent à Budapest un mémorandum pour dénucléariser l’Ukraine, tout en affirmant sa souveraineté. Des milliers d’ogives soviétiques se trouvent alors sur son sol, ce qui fait du pays la troisième puissance nucléaire du monde. Le texte se veut simple, lisible, et porteur d’un engagement clair.
Kiev accepte de remettre ses armes à la Russie et d’adhérer au TNP comme État non nucléaire. Des accords similaires sont conclus avec la Biélorussie et le Kazakhstan. La ligne est nette : désarmement en échange d’une sécurité garantie, avec des principes issus de l’Acte final d’Helsinki. La promesse rassure, elle engage, et elle apaise.
Le général Jérôme Pellistrandi rappelle que l’Ukraine renonce alors à un outil dissuasif majeur. En retour, les grandes puissances jurent de respecter l’indépendance, la souveraineté et les frontières existantes. Ces garanties de sécurité paraissent suffisantes, car l’ordre post-guerre froide semble stabilisé. L’histoire, pourtant, allait détromper tout le monde.
Un cadre sans levier d’application face à Moscou
Le mémorandum n’empêche pas l’invasion. Moscou viole l’intégrité territoriale ukrainienne. Le 4 mars 2022, neuvième jour de la guerre, Volodymyr Zelensky raille l’inaction occidentale : « cinquante tonnes de carburant diesel » pour, dit-il, « brûler le Mémorandum de Budapest ». Le symbole tient, l’efficacité manque, et la colère grandit.
Pour les trente ans du texte, Zelensky parle d’un document « qui n’a pas fonctionné un seul jour ». Une signature, des assurances, ou des promesses ne suffisent pas à garantir la sécurité. L’expérience le prouve, car l’agresseur teste les lignes, puis les franchit. L’écart entre parole et protection devient ainsi flagrant et coûteux.
Le dispositif prévoit des consultations et un recours au Conseil de sécurité des Nations unies. Il n’oblige pas à intervenir. Le contexte explique cette faille : Russie de Boris Eltsine affaiblie, Occident persuadé d’avoir fermé le dossier de la guerre froide, Ukraine dominée par des oligarques. Les garanties de sécurité restaient largement symboliques.
Ce que valent aujourd’hui des garanties de sécurité crédibles
Pour Nicolas Tenzer, l’argument juridique sert de prétexte en 2014, lors de l’annexion de la Crimée, à la non-intervention américaine et britannique. La ligne d’Obama privilégie la retenue, déjà visible après les attaques chimiques de la Ghouta en 2013. La crédibilité occidentale en sort affaiblie, et l’adversaire en tire des leçons.
Selon Tenzer, une action en 2014 aurait pu faire reculer Moscou, alors moins armée. La dissuasion, c’est aussi la perception d’un coût immédiat. Quand elle s’effrite, les brèches s’ouvrent, et le calcul change. Les acteurs ajustent leurs risques, puis testent leurs marges, car l’absence de réponse nourrit l’audace.
Dans les tranchées, la mémoire reste vive : « erreur historique », « prix payé dans le sang », disent des soldats. Beaucoup pensent qu’avec l’arsenal d’hier, l’attaque n’aurait pas eu lieu. Les discussions récentes à la Maison-Blanche évoquent « des garanties fournies par divers pays européens, en coordination avec les États-Unis ». Des garanties de sécurité devront, cette fois, prévoir des actes.
Définir un engagement vérifiable, ferme, et applicable sans ambiguïté
Les leçons sont claires : pas d’illusions, mais des obligations précises, assorties de mesures automatiques. Il faut des calendriers, des moyens, et des lignes rouges crédibles, car la dissuasion vit de contraintes tangibles. Des mécanismes de défense, de sanctions et de coordination doivent exister, s’activer vite, et rester lisibles. Les garanties de sécurité n’auront de valeur que si elles contraignent réellement.