Je n’ai pas fait 6 ans de médecine en Roumanie pour rentrer en France dans une spécialité qui me passionne moins

Un parcours heurté par des règles mouvantes, un classement vécu comme un piège, une ambition qui refuse d’abandonner

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Là-bas, le rêve semblait accessible, mais les règles ont changé en route. Beaucoup d’étudiants partis pour contourner l’échec initial affrontent un nouveau mur. Leur vocation heurte un classement opaque et des coûts lourds. La médecine qu’ils ont choisie se heurte au réel. Le doute gagne, mais la détermination reste vive. Reste une question simple : où exercer sans renoncer à soi ?

Entre passion de la médecine et stratégie imposée

Recalés à la Paces, Louis et d’autres ont choisi la Roumanie, qui recrute sur dossier, raconte whatsupdoc-lemag.fr. Le pari paraît rationnel. Ils paient plus de 8 000 euros par an pour un diplôme reconnu dans l’Union. L’objectif est clair : avancer malgré le numerus clausus. Le cap est tenu, car l’espoir demeure.

Le quotidien suit un rythme proche de la France. Les matinées se passent à l’hôpital, puis les cours prennent le relais. Chacun apprend le roumain pour parler aux patients. Chaque été, beaucoup reviennent en stage en France. Ils gardent des liens avec les équipes. La théorie suit les standards européens, mais pas les EDN.

Le décalage coûte cher. Uness reste payant pour eux. Ils financent des préparations privées et s’entraident. La Corporation médicale de Cluj les appuie pour les démarches. Un père, Rémi Baudin, endeuillé après le suicide de sa fille, alerte sur les risques. Cette médecine exigeante réclame aussi un cadre humain.

Choisir sa voie en médecine sans se trahir

Une fois diplômés, les EDN décident de la suite. Le matching attribue une spécialité selon le rang. Beaucoup obtiennent la médecine générale ou la psychiatrie, pas la chirurgie ni l’anesthésie. L’écart de préparation pèse, car ils n’ont pas été formatés tôt. La frustration est nette, et le choix devient cornélien.

Certains préfèrent d’autres chemins. En Roumanie, quatre années en plus ouvrent des spécialités chirurgicales sans concours. La Suisse et l’Allemagne misent sur dossiers et entretiens. Des internes partent donc là-bas. Ils privilégient leur passion et acceptent l’exigence. La route est longue, mais elle reste cohérente.

D’autres reviennent malgré tout. Régis dit avoir été accueilli sans préjugé par ses chefs. Louis souligne l’adaptabilité acquise à l’étranger. Les équipes y voient des profils solides. Leur médecine de terrain rassure. Pourtant, l’impression demeure : la France ne facilite pas ces retours. Le pays manque pourtant de praticiens.

Réforme, chiffres en berne et promesses bloquées

Depuis 2021, la réforme du second cycle change tout. Les EDN exigent 14 sur 20 minimum. Les ECOS évaluent les gestes cliniques. Le classement se fait par spécialité. Un algorithme attribue ensuite les postes. Le dispositif vise l’équité. Il dérange cependant des parcours atypiques.

Les étudiants formés en Roumanie ignorent s’ils pourront passer en France. Ils doivent financer une préparation estimée à 7 500 euros par an. La charge s’ajoute aux années déjà payées. L’incertitude les use. Elle repousse des retours possibles. Elle fragilise des familles et ralentit des choix.

Les chiffres parlent. Avant 2023, plus d’une centaine rentraient chaque année. En 2024, ils n’étaient que neuf. La Corporation de Cluj espère quinze à trente retours. Fin 2023, Yannick Neuder, alors député et aujourd’hui ministre, a porté une loi. Adoptée en première lecture, elle patine. Le système de médecine français s’en prive.

Ce qu’il faut changer pour ne pas gâcher des vocations

Six années d’efforts ne doivent pas finir en impasse. Clarifier les concours, reconnaître les équivalences et soutenir la préparation EDN changerait la donne. Il faut aussi alléger les démarches et rendre lisibles les règles. Ces talents n’attendent que cela. La médecine y gagnera, et les patients aussi.

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