Censure partielle de la Loi Duplomb : « les personnes qui ont signé la pétition doivent assumer de voir disparaître une production locale », les betteraviers furieux

Un bras de fer relance l’équilibre entre santé des abeilles et survie des betteraves françaises

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Décision inédite et colère froide : la censure partielle de la Loi Duplomb par le Conseil constitutionnel, le jeudi 7 août, interdit la réautorisation de l’acétamipride, néonicotinoïde central pour les betteraves du Centre-Val de Loire. Entre défense de l’environnement et survie d’une filière sucrière fragilisée, les positions se crispent, les chiffres s’entrechoquent et les acteurs réclament, chacun, une issue crédible.

Après la Loi Duplomb, une filière betterave au pied du mur

Patron de la CGB en Centre-Val de Loire, affiliée à la FNSEA, Alexandre Pelé parle d’« une vraie déception » le vendredi 8 août, raconte franceinfo.fr. « Je demande aux 2 millions de signataires d’assumer la disparition d’une production locale », lance-t-il, après la censure de l’article réautorisant l’acétamipride. Une colère froide traverse les betteraviers.

Le Conseil constitutionnel juge que réautoriser ce pesticide heurterait la Charte de l’environnement, qui impose au législateur de préserver et d’améliorer l’environnement. Or l’acétamipride, de la famille des néonicotinoïdes dits « tueurs d’abeilles », sert surtout contre les pucerons vecteurs de la jaunisse de la betterave dans la région touchée.

La Coordination rurale s’emporte : « l’agriculture n’est rien » face à l’environnement. Selon elle, 400 000 agriculteurs pèsent moins que 2 millions de pétitionnaires. La décision est tombée le jeudi 7 août, et la filière réclame des réponses rapides sur le terrain. La Loi Duplomb cristallise désormais cette fracture.

Santé, précaution et Loi Duplomb : le camp qui applaudit

À l’inverse, la Confédération paysanne salue une victoire « au nom de la santé et des principes de précaution ». Son co-porte-parole en Eure-et-Loir, David Grassin, aurait préféré une censure totale. Avec une telle mobilisation citoyenne, dit-il, rien d’étonnant : 2 millions de personnes ont signé contre la Loi Duplomb.

Les solutions existantes, même imparfaites, « apportent une réponse », insiste-t-il. Des betteraviers en bio « s’en sortent », preuve qu’un itinéraire technique sans néonicotinoïdes reste possible, malgré la jaunisse. Le syndicat propose d’améliorer les alternatives, pendant que la recherche progresse, afin de réduire l’exposition aux molécules problématiques.

Sur la compétitivité, David Grassin reste sceptique : « de très nombreux agriculteurs sont en déficit depuis des années », et l’acétamipride « ne changerait en rien la situation ». La transition demandera du temps, cependant les leviers économiques dépassent un seul intrant, surtout quand les prix et les charges étouffent.

Terrain, alternatives et risque de décrochage européen

Pelé évoque « un vrai péril » : en Centre-Val de Loire, la jaunisse touche 10 % des parcelles chez les moins touchés, jusqu’à 100 % ailleurs. L’autorisation actuelle ne permet qu’une pulvérisation, quand « il faudrait trois ou quatre » pour contenir les pucerons.

Pour les planteurs, la Loi Duplomb n’autorisait pas une généralisation, elle visait une option « en cas de coup dur ». Le temps que la génétique livre des betteraves plus résistantes à la jaunisse, horizon « à 1, 2, 3 ans », afin d’éviter des fermetures d’exploitations.

Il invoque la concurrence : pesticide « homologué partout en Europe sauf chez nous », filière Loiret, Eure-et-Loir fragilisée. Moins de sucre ici, plus d’imports avec des molécules interdites. La Conf’ veut un cahier des charges import (mêmes normes, même coût du travail et environnemental) avec pénalités. Le sénateur Laurent Duplomb (LR) promet un nouveau texte.

Pour sortir de l’impasse, gestes concrets et débat apaisé

Reste l’épreuve du marché et des choix citoyens. Marc Fesneau, député MoDem du Loir-et-Cher, invite à n’acheter que du sucre français, tandis que CGB et Confédération paysanne se disent prêtes à batailler encore. La Loi Duplomb a ravivé des lignes de fracture; les manifestations de janvier 2024 ont montré un soutien, pourtant une voie de compromis demeure, entre exigence environnementale et sauvegarde d’une production stratégique.

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