Pommes de terre : désespérés par « l’effondrement des prix », des producteurs offrent leur récolte plutôt que de la vendre

Quand l’abondance casse le marché et transforme la récolte en gestes de solidarité

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La crise frappe de plein fouet les producteurs de pommes de terre. L’abondance record n’a pas apporté de soulagement, elle a cassé le marché. Les négociations avec la grande distribution ont échoué, tandis que les cours chutent brutalement. Des planteurs renoncent à vendre et préfèrent donner. La France, pourtant premier exportateur mondial, encaisse le choc, entre colère, pertes et gestes de solidarité visibles.

Un record de production, un prix qui s’effondre

Selon tf1info.fr, la récolte 2025 devrait atteindre 8,5 millions de tonnes, son plus haut niveau en dix ans. Cette surproduction a provoqué une chute du prix, passée de 150 euros à 15 euros la tonne en un an. Le constat est partagé, le déséquilibre s’est installé durablement.

L’Union nationale des producteurs de pommes de terre juge ce tarif « destructeur ». Le bras de fer avec l’industrie et la grande distribution s’intensifie. Aucun accord crédible sur un prix minimal n’a émergé. La relation commerciale se crispe, les marges s’évaporent, l’amertume grandit chez les planteurs.

Faute de solution, beaucoup renoncent à la vente, une première à cette échelle. Certains choisissent le don, d’autres la destruction. Le gain attendu ne couvre plus les coûts. Les exploitations serrent les rangs, car chaque semaine pèse lourd. Les stocks s’accumulent, la trésorerie s’assèche, la confiance recule.

Dons de pommes de terre et ruée des riverains

À Pissos, dans les Landes, un producteur a déversé plusieurs milliers de tonnes. Le champ s’est transformé en montagnes de tubercules. Des centaines de riverains, alertés par les réseaux sociaux, sont venus grimper ces amas. Le geste a surpris, puis ému. L’ampleur a illustré la gravité du blocage.

Michel, interrogé par TF1, dit repartir avec cent kilos. Un sac coûte entre trois et quatre euros, ici tout est gratuit. L’économie réalisée compte pour les ménages. Le contraste frappe, la chaîne de valeur se brise. Le gaspillage évité par la collecte apporte au moins un sens immédiat.

Un autre habitant repart avec huit kilos. Les images montrent une solidarité concrète. Elles révèlent aussi l’absurdité d’un prix agricole trop bas. L’écart entre coût de production et rémunération s’élargit. Le don apaise la colère, sans régler la cause. La confiance envers les acheteurs s’effrite.

Vendre des pommes de terre à perte ou renoncer

À Saint-Jean-d’Illac, Samuel Allix résume : « on récolte trop, les prix s’écroulent ». Les consommateurs paient moins, certains lots sont partis à 0,15 euro le kilo. Le bénéfice disparaît. L’arbitrage devient cruel, celui de vendre à perte ou renoncer. Les comptes d’exploitation vacillent, les investissements sont reportés.

À Loon-Plage, Laurent Declercq laisse pourrir 400 tonnes aux champs. Installé en 1990, il n’avait jamais vu pareil chaos en trente-cinq ans. Il l’a répété au JT de TF1 du 28 août. Le geste est radical, mais logique. Le marché, vampirisé par la Chine, ne redémarre pas.

Les industriels veulent d’abord écouler leurs stocks avant toute commande. Les cours resteront bas, tant que l’excédent persiste. Les planteurs attendent un cadre de prix, clair et tenable. Ils espèrent une issue négociée. La filière, pourtant efficace, se heurte au mur des volumes et des marges.

Ce que cette crise agricole révèle et ce qui peut suivre

La filière des pommes de terre affronte un paradoxe : abondance record, revenus en berne, dons à grande échelle. Les chiffres disent tout : 8,5 millions de tonnes, 150 à 15 euros la tonne, 0,15 euro le kilo. Sans prix plancher crédible, le cycle s’enraye. Un accord durable reste la clé d’un redressement.

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